Ploubezre entre passé et avenir
le patrimoine bâti

L'église Saint-Pierre - La chapelle de Kerfons - La chapelle Sainte-Thècle - Les Cinq Croix - Les manoirs de Ploubezre

Si l'histoire de Ploubezre se situe essentiellement dans le contexte élargi du pays proche ou lointain (Lannion, le Trégor, la Bretagne, la France, l'Europe...), le patrimoine bâti lui est propre, et témoigne d'une occupation attestée dans le sol depuis au moins l'époque néolithique.

Le tumulus du Rhun (breton Run = tertre) fouillé au XIXe siècle et le menhir dit "ar Min Sul" (la pierre de soleil) localisé à Kermorgan sont des indices de la préhistoire, complétés par le cimetière de Keryanaouen remontant à l'âge du bronze, et semble-t-il, utilisé jusqu'à l'époque gallo-romaine (le site a été fouillé avec l'ARSSAT en 1990). Une stèle gauloise ronde existe également à Kerlan.

Il n'y a pas de trace de l'installation des Bretons en Armorique vers les Ve-VIe siècles, si ce n'est le nom de la paroisse, Plebs Petri, cité dans le procès de canonisation de saint Yves rédigé vers 1330. C'est donc un personnage inconnu nommé Pierre qui a fondé la paroisse, et l'église a pris le nom des saints Pierre et Paul plus connus (le concile de Whitby en 664 aurait imposé aux églises de grande et de petite Bretagne d'être placées sous la dédicace de saint Pierre). La fondation de Ploubezre est typiquement bretonne, un groupe de Bretons s'installant sur une hauteur et non au bord d'une rivière. Puis, jusqu'au Xe siècle, il n'existe presque aucune information sur la vie des Bretons dans ce qui est devenu la Bretagne. Les habitants occupent des maisons en bois, éventuellement construites avec des soubassements en pierres.

L'église Saint-Pierre

Si la première église a dû être en bois, l'église actuelle a été reconstruite vers 1870, dans un style cher à Viollet-Leduc (le néo-gothique), en conservant le clocher-mur de style Renaissance (daté de la seconde moitié du XVIe siècle, attribué à l'atelier Beaumanoir), ainsi que plusieurs chapiteaux anciens de style roman. Les pierres de l'ancienne église ont été certainement réutilisées pour construire la nouvelle.

 

L'église contient plusieurs statues anciennes, ainsi que les armoiries des familles nobles de la paroisse, peintes au dessus des colonnes de la nef.

Sainte Barbe est reconnaissable grâce à sa tour, où elle fut enfermée ; elle tient normalement une palme à l'autre main, mais il n'en reste que le bout ; sainte Catherine écrase l'empereur par l'étendue de son savoir, dont témoigne le livre de la bibliothèque d'Alexandrie qu'elle tient à la main. Au XXe siècle, on a reconnu que ces deux saintes, martyrisées au IIIe ou IVe siècle, véritables stars du Moyen Age, étaient inconnues avant le Xe siècle, et que leurs Vies avaient été totalement inventées à cette époque. Elles ont donc été rayées du calendrier romain en 1969 et leur culte supprimé.
Sainte Barbe reste cependant la patronne des artilleurs, des pompiers, des gardes-côtes, des architectes...
Sainte Catherine est patronne des philosophes, des étudiants, des notaires...

L'ancien cimetière autour de l'église a été déplacé, mais le mur d'enceinte est resté intact, conservant beaucoup de pierres et croix anciennes, y compris une inscription en moyen breton que l'on peut lire "tut mat ho pater leveret - o tremen Ploeberz an bezret" (braves gens dites votre pater en passant Ploubezre (dans) le cimetière). Aujourd'hui on écrirait et prononcerait : "Tud vat la(va)rfet ho pater - o tremen Plouber er vered". Il faut cependant noter qu'au moyen âge les mutations des initiales (ici, m > v et b > v) n'étaient pas écrites mais quand même prononcées ; et que les "z" de Ploubezre et de bezret n'étaient sans doute plus prononcés, car le sculpteur n'a pas su les placer correctement avant les "r". Cette inscription est peut-être datable des environs de 1400, car l'église fut semble-t-il gravement endommagée lors de la guerre de succession de Bretagne (1341-1364).

 


croix ancienne près du monument aux morts

Le Moyen-Age

Vers l'an 1000, la féodalité se met en place, et le besoin de se défendre conduit les chefs à fortifier leur résidence, le plus souvent sur une motte, soit naturelle soit artificielle. A Ploubezre, il y a au moins deux exemples : à Runfao où un site naturel de hauteur a été fortifié et à Kerhervé où une motte artificielle a été construite au bord du ruisseau. Les premiers bâtiments étaient alors en bois et entourés de palissades défensives.

Puis la technique de construction en pierres taillées va revenir en force : les premiers manoirs font leur apparition, et Ploubezre va en héberger plusieurs, dont certains vont prendre une importance grandissante au cours des siècles. Les manoirs qui ont survécu jusqu'à nos jours sont le plus souvent des reconstructions du 15e et 16e siècle : Kerguéréon, Kerauzern, Coatarel (renommé Coatallain à l'époque moderne), Keranroux, Rosalic, Kerael... Runfao va tomber en ruines, et Kerhervé va voir la construction d'un manoir à quelque distance de la motte ; Coatfrec et Kergrist vont prendre une importance exceptionnelle pour devenir de véritables châteaux.

En parallèle, des chapelles se multiplient sur la paroisse, souvent éléments privatifs associés aux manoirs. Sainte-Thècle au bord du Léguer est peut-être une fondation après croisade par Rolland de Coatarel ; Saint-Fiacre de Runfao est une belle chapelle gothique. Saint-Ethurien au sud près de Stang-ar-Garo a disparu, ainsi que Sainte-Anne de Kerguéréon ; Saint-Jacques du Ruguirec, en mauvais état, fut rasé vers 1960 (mais des anciens de Ploubezre n'ont pas oublié les derniers pardons).

La chapelle de Kerfons

La plus belle des chapelles de Ploubezre est certainement Kerfons, construite dans un site en pente près du Léguer qui portait le nom de Kerfaouez, "le hameau de la Hêtraie" ; de grande taille, richement sculptée, elle reçut vers 1480 un superbe jubé en bois, sans conteste l'un des plus beaux de Bretagne.
L'orientation générale de la chapelle est classiquement ouest-est. Au pignon ouest, la porte d'entrée du fond de la nef est peut-être la plus ancienne, mais n'est plus utilisée comme entrée principale depuis longtemps.

Un bref historique
La première chapelle Notre-Dame de Kerfons fut détruite au XIVème siècle pendant la guerre de succession de Bretagne (1341-1364), ainsi que l'église paroissiale de Ploubezre : ceci est attesté par deux bulles d'indulgence des 21 juillet 1387 et fin mars 1389. La chapelle fut reconstruite dès le premier quart du XVème siècle par les seigneurs de Coatfrec, château situé 4 km plus au nord et surplombant le Léguer ; elle fut remaniée par Guillaume de Penhoët, seigneur de Kerimel et de Coetfrec, après que la seigneurie de Coëtfrec eut été érigée en sa faveur en baronnie, le 13 juin 1451. La richesse des nouveaux apports est peut-être liée au fait qu'il était chambellan du duc de Bretagne ; en 1559, son descendant René-Claude de Saint-Amatour et Claude de la Touche-Limousinière, sa femme, firent agrandir l'aile sud dans le style Renaissance, dont ce fut probablement la première manifestation dans le Trégor, et l'une des premières en Bretagne. Les mêmes pierres furent utilisées pour cette extension, dans un souci d'homogénéité. Contrairement à la petite chapelle du château, Kerfons servit de chapelle sépulcrale aux seigneurs de Coatfrec, comme le montrent les nombreuses dalles funéraires à l'intérieur de l'édifice.

Chapelle de Kerfons ; à droite, saint Yves à l'angle de sa chapelle


La chapelle vue de l'enclos au sud
Lorsque l'on pénètre dans l'enclos au sud de la chapelle par l'un des deux échaliers, on peut voir les 3 styles utilisés dans la chapelle : le gothique pour la reconstruction primitive, le gothique flamboyant pour la fenêtre supplémentaire ajoutée après la construction du jubé à l'intérieur, et le style Renaissance pour l'aile dédiée à saint Yves.
La phase de reconstruction initiale fut faite selon un plan en tau, probablement symétrique, plan assez fréquent dans le Trégor, dans un style gothique ogival sobre mais harmonieux. A l'extérieur, la porte d'entrée gothique en arc brisé est surmontée d'une accolade avec fleuron. Deux fenêtres gothiques au sud éclairaient la nef ; la fin du XVe siècle vit la séparation de la nef et du choeur par une clôture dite jubé, les fidèles étant désormais éloignés de l'autel ; la construction du jubé ayant masqué l'une des deux fenêtres, il fallut, pour redonner de la lumière, ouvrir une troisième fenêtre, qui fut faite en gothique flamboyant, remarquablement sculptée d'une guirlande de vigne, aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur.
L'aile Renaissance dispose également d'une belle porte d'entrée percée dans le mur ouest ; construite avec son arc en plein cintre, elle est flanquée de deux colonnes corinthiennes et surmontée d'un fronton triangulaire au milieu duquel on peut voir le buste d'un homme barbu ; la tradition l'identifie à Joseph Faudet, seigneur du Milin-Baper, qui aurait assumé la charge de la construction. Le fronton est surmonté d'une niche Renaissance avec des guirlandes de fleurs et de fruits, puis d'un second fronton avec un motif en chou frisé.
Implanté dans le mur de l'enclos se trouve également un petit calvaire, où l'on retrouve les groupes sculptés traditionnels : côté ouest : la crucifixion, côté est : une Vierge à l'enfant entourée de Marie-Madeleine et de saint Pierre. Les personnages sont sculptés dans la pierre de Kersanton, comme dans les plus beaux calvaires des enclos paroissiaux du Léon.
On peut voir aussi depuis l'enclos le clocher du pignon ouest, qui abrite une seule cloche.
Sur le pignon sud de l'aile dédiée à saint Yves, un gracieux campanile repose sur quatre colonnes finement sculptées encadrant quatre panneaux en bas-relief représentant deux hommes et deux femmes, sortes de cariatides gainées, de style typiquement Renaissance.
A l'angle sud-est de l'aile sud, une niche à pilastres abritant une statue de saint Yves est surmontée d'un double dôme dans le plus pur style Renaissance. On retrouve les mêmes niches d'angle ailleurs en Bretagne, comme par exemple à la Cathédrale de Rennes.
Il est remarquable que depuis l'enclos on puisse voir en totalité les plus beaux éléments architecturaux extérieurs de la chapelle.

Sur le mur ouest, l'ancienne fenêtre gothique, en partie murée, a été ornée de motifs Renaissance

St Yves porte toujours son sac à procès

Angelot près de la colonne Renaissance

Le jubé
Lorsqu'on pénètre à l'intérieur de la chapelle, le jubé, oeuvre d'un atelier morlaisien anonyme, attire immédiatement les regards.
Commandé en 1480 par Jean de Penhoët et Guillemette Péan, sa femme, daté des années 1481-1485 (par sa porte en "anse de panier"), le jubé de Kerfons est le chef-d'oeuvre de la chapelle ; il est sculpté en bois dans le style gothique flamboyant, alors arrivé à son apogée. La clôture comporte de belles arcatures séparées par des colonnes torsadées de style Louis XII. La décoration très fouillée comporte des symboles comme la vigne associée aux feuilles de chêne, des guirlandes tressées, des entrelacs finement contournés. Le jubé a été restauré et redoré en 1990.

La tribune en encorbellement est décorée côté nef de 15 panneaux représentant de droite à gauche : le Christ, Marie-Madeleine, les douze apôtres et sainte Barbe. Ce dernier panneau à gauche représente une femme tenant un livre et une palme ; une petite tour à gauche de sa tête fait penser à sainte Barbe, mais comme elle n'a pas d'auréole et ne tient pas la tour dans sa main comme dans la statue de l'église de Ploubezre, il n'est pas interdit de penser qu'il s'agit de la maîtresse des lieux et que la tour est une tour de Coatfrec. Chaque personnage est disposé dans une niche surmontée d'un dais gothique ; chacun porte ses attributs : saint Jacques avec le levier à fouler, saint Philippe et sa croix en tau, saint Barthélémy et son couteau, saint Mathieu et la hache, ...

Ce magnifique jubé, l'un des plus beaux de Bretagne, témoigne de la maîtrise des sculpteurs, des huchiers, de tous les artisans du bois (probablement venus de Morlaix) qui ont participé à sa réalisation. Au bas de la tribune, dix anges aux ailes dorées portent les instruments de la Passion, ou des écussons, dont la plupart ont été martelés sous la Révolution.

Côté choeur, on peut admirer de l'autre côté du jubé un bel escalier à vis, servant à accéder à la tribune pour les lectures, les prônes et les sermons. Treize panneaux décorés d'entrelacs avec feuillages, d'arabesques chères à la Renaissance, et mélangés à des accolades gothiques ornent ce côté. Une autre suite d'anges, placés en pendentif, rappelle celle du jubé du Faouët.

Le choeur
Le maître-autel en granite est surmonté d'un retable daté de 1686, que l'on rapproche d'ouvrages similaires de la même époque en Bavière ; il apparaît comme un assemblage de multiples éléments, tous sculptés avec une minutie et une variété exceptionnelles. Il montre aussi qu'à l'époque, la Bretagne est une plaque tournante du commerce maritime européen, et que les richesses artistiques et les artistes eux-mêmes circulent par les mêmes voies.
Ce retable baroque a été vandalisé par des pillards fin 2008. Leur arrestation rapide a permis de récupérer la plupart des éléments dérobés, et l'ensemble a fait l'objet d'une restauration importante en 2012, y compris la copie d'éléments manquants.

Ci-dessous, le choeur après restauration en juin 2012

A gauche du choeur, se trouve sur un petit retable surélevé la statue de Notre-Dame de Kerfons ; datée de 1685, cette statue représente la Vierge portant son enfant et écrasant un diable féminin au corps couvert d'écailles de poisson mais à queue de serpent. Le thème de la Vierge terrassant le dragon est fréquent, surtout après les missions du Père Maunoir, qui encourageait les pieuses confréries à rendre un culte à la Vierge Marie, à réciter le chapelet du Rosaire, à construire de nombreux retables pour l'instruction des fidèles...

Sur la droite du choeur, devant un second petit retable surélevé, un évêque sans nom, identifié par certains comme "saint Jacques", mais peut-être aussi saint Tugdual, fondateur du diocèse de Tréguier.

Les chapelles latérales

A gauche du choeur, dans la chapelle de la Vierge, un beau groupe de l'Annonciation se trouve également en hauteur à côté du vitrail.


Le groupe de l'Association - A droite, élément du vitrail de la chapelle de la Vierge.
 

A droite du choeur, dans l'aile sud Renaissance dédiée à saint Yves, se trouve un retable lavallois daté de 1612 et comportant un tableau (huile sur toile) de saint Yves entre le riche et le pauvre. Une statue plus ancienne de saint Yves se trouve à droite du retable. Le culte de saint Yves était très populaire dans les églises et chapelles du Trégor; et l'église de Ploubezre est dotée elle aussi d'un retable dédié à saint Yves.
La chapelle contient également quelques autres statues, tel ce saint Sébastien qui a perdu ses flèches, ou ce saint inconnu sans attribut qui puisse permettre de l'identifier.
A côté du retable, sur le mur est, se trouve une réplique de la porte Renaissance, qui reproduit dans le même style mais à échelle réduite les mêmes éléments du décor qu'à l'extérieur (niche, fronton, colonnes corinthiennes, buste).

La charpente de voûte de cette aile sud accuse une forme de coque de bateau renversé. Oeuvre de charpentiers de marine, elle comprend des personnages sculptés dans le style des figures de proue de l'époque. On peut voir sur les poutres horizontales des queues d'hermine noires peintes sur fond blanc.
Quelques figures sculptées plus anciennes peuvent aussi être vues dans la charpente de la chapelle de la Vierge.

Autres éléments décoratifs de Kerfons
Le vitrail au-dessus de l'autel comporte encore des éléments très anciens représentant des personnages. Il en est de même pour un panneau du vitrail de la chapelle de la Vierge. Une chaire très postérieure au jubé (elle est datée de 1681) est installée dans le choeur en avant du jubé sur le côté droit.
On peut voir encore sur un enduit mural au fond de la chapelle les restes de peinture de motifs floraux.

Le jubé sculpté et peint en bois polychrome est classé monument historique depuis le 20 mars 1899, l'ensemble de la chapelle depuis le 8 juillet 1910 et le reste du mobilier depuis le 3 avril 1975.
La chapelle de Kerfons mérite assurément son classement parmi les plus beaux joyaux que nous ait légué le Moyen-Age en Bretagne.

Les Cinq Croix - Ar Pemp Kroaz

Sur la route du bourg à Kerfons, on passe devant le groupe des Cinq Croix (ar Pemp Kroaz) ; contrairement à l'affirmation de la carte postale ancienne qui associe le monument à la célébration d'une victoire sur les Anglais, il s'agit d'un regroupement de croix diverses fait en 1733 ou postérieurement par le recteur de Ploubezre, comme le montre la date sculptée sur une pierre de l'ensemble. Il n'y a pas de trace d'invasion de troupes anglaises dans le Trégor à cette époque.


La chapelle Sainte-Thècle à Keriel

Elle est située sur la commune de Ploubezre, près du Léguer, à proximité du pont qui mène vers Buhulien.
Les eaux de la mer remontent le Léguer jusqu'à cet endroit lors des fortes marées. Sur la hauteur vers le sud, dominant de 40 mètres la rivière, se trouvent les ruines du château de CoatFrec. Actuellement propriété de la commune mais enclavée dans un terrain privé, la chapelle est ouverte au public le 3e dimanche de septembre lors du pardon de sainte Thècle. Ce dimanche coïncidant avec les journées du patrimoine, il avait été décidé cette année d'ouvrir la chapelle le dimanche après-midi, à l'occasion d'une promenade musicale organisée à partir de Lannion par l'association "Bord an Aod". La visite et les commentaires sur la chapelle et la sainte ont été assurés par l'ARSSAT (Association pour la Recherche et la Sauvegarde des Sites Archéologiques du Trégor).
C'est environ 200 personnes qui ont défilé dans la chapelle le dimanche après-midi, et la jeune Thècle venue découvrir la chapelle de sa patronne a vécu des moments mémorables en écoutant les explications...

La chapelle est une construction post-Renaissance, avec une nef pouvant accueillir une centaine de personnes ; un petit transept complète l'édifice. Le clocheton est un lanterneau de style Renaissance hébergeant une cloche. Le linteau de la porte d'entrée comporte une gravure peu visible avec la date de 1871 : il s'agit probablement de travaux de rénovations. A cette date doit être associé le blason figurant au-dessus du tableau du fond du choeur : ce blason est celui du pape Pie IX, pape de 1846 à 1878, dont les armoiries figurent sur de nombreux édifices rénovés sous le second empire (selon l'information fournie par P. Salaün le 19 sept. à Guingamp lors de la visite en breton de la basilique Notre-Dame de Bon-Secours, où l'on voit également ce blason). Il est évidemment probable que les travaux de rénovation de la chapelle ont été lancés avant la chute de l'empire en septembre 1870 ; ces travaux semblent avoir concerné les enduits muraux intérieurs et les peintures associées. Les volutes du plafond ressemblent en effet beaucoup à celles du plafond de l'église de Ploubezre, reconstruite dans les années 1860.

Actuellement, la chapelle a un statut très particulier, puisque le sol sur lequel elle est construite n'appartient pas à la commune mais aux propriétaires du terrain environnant. Cette situation résulte des ventes des biens religieux lors de la Révolution, la propriété du sol n'ayant sans doute pas été associée avec celle de la chapelle.

Lors de la Révolution, la chapelle a donc été détachée des terres associées à la seigneurie de Coatfrec. Au XVIIIe siècle, la chapelle fait partie des biens des propriétaires de Coatfrec, biens qui semblent être transmis parfois par acquisition et non par héritage (selon extraits de l'Echo de Lannion en 1965 écrits par Yves Briand s'appuyant sur les comptes de fabrique, document reçu par Jean-Yves Marjou de l'archiviste de l'évêché ; et la liste des seigneurs de Coetfrec citée par J.-Y. Marjou).

La guerre de la Ligue semble avoir été l'étape précédente, occupation de Coatfrec par Guy Eder de la Fontenelle début 1592, et démantèlement du château ordonné par le Parlement de Bretagne en décembre 1592. Les troubles de la Ligue ont pu conduire à la destruction de la chapelle précédente, et entraîner une reconstruction à mettre au compte d'une demande pressante des habitants du quartier et non à celui des propriétaires du château, celui-ci étant devenu inhabitable. Les comptes de fabrique présents vers 1700 et les cantiques anciens semblent témoigner pour une reconstruction de la chapelle vers la fin du XVIIe siècle. La construction semble solide et soigneusement réalisée ; l'entretien de la couverture, en très bon état actuellement, est assuré par la mairie. Les deux cantiques à sainte Thècle disponibles (l'un imprimé cher Anger à Lannion, reçu par J.Y. Marjou de l'archiviste de l'évêché, l'autre imprimé chez Le Goffic à Lannion et faisant partie de la collection de Daniel Giraudon) font état de guérisons de personnes des environs dont Jean-Yves Marjou a retrouvé les naissances vers 1640.

Ces deux cantiques, qui ne se recopient pas mais ont une base ancienne commune, parfois au mot près, attestent d'une chapelle détruite dont l'emplacement n'est pas vraiment précisé. Le plus ancien parle même d'une grotte au pied du château comme premier site d'installation du culte de sainte Thècle. Cette grotte n'est pas connue sur la pente qui descend du château. Les deux cantiques parlent de la fondation d'origine comme étant celle d'un ermite venu d'Italie en Bretagne ; si l'existence de la chapelle Sainte-Thècle est unique en Bretagne, ce récit de la venue d'un ermite d'Italie est aussi inhabituel ; on peut même douter de son authenticité vu le caractère improbable de l'évènement. S'agit-il du besoin de répondre à l'existence de nombreux ermites bretons pour une sainte d'origine très lointaine ? Aucune époque n'est donnée pour la venue de cet ermite, ce qui n'aide pas à valider cette proposition. L'origine de la sainte en Asie Mineure, à Iconium (aujourd'hui Konya à l'intérieur de la Turquie sur une grande voie de communication) suggère un apport de reliques lié aux Croisades. Pourtant Icône fut prise définitivement par les Turcs vers 1100. Mais Thècle serait décédée à Seleucie (aujourd'hui Silikfe) sur la côte sud de Turquie, également sur une voie de passage. On sait que Rolland de Coattarel (aujourd'hui Coat-Allain, proche de Keriel) participa à la 7e croisade en 1248 avec saint Louis. Mais il est possible que des seigneurs de Coatfrec aient aussi participé à des Croisades.

Le culte de sainte Thècle est peu répandu en France : on la trouve à Chamalières (Puy-de-Dôme), à Valloire (Hautes-Alpes), Saint-Jean-de-Maurienne (Savoie), Peillon (Alpes-Maritimes), Séguret (Vaucluse), Rocles (Lozère)... Il existe un couvent de Sainte-Thècle à Maalula en Syrie, et une paroisse Sainte-Thècle au Québec fondée en 1873. Une basilique Santa Tecla existe à Milan, et la cathédrale Santa-Tecla de Tarragone en Espagne est réputée héberger les restes de la patronne de la ville. Chaque année, la grande fête de Santa Tecla a lieu plusieurs jours a Tarragone, jusqu'au 23 septembre. Une liqueur chartreuse nommée aujourd'hui Santa Tecla y est aussi fabriquée (les Chartreux, expulsés de France en 1903, s'étaient installés à Tarragone pour y continuer leur production, aujourd'hui rapatriée à Voiron [Isère] ).

La Vie de sainte Thècle est connue, puisqu'il s'agit d'un personnage prétendu authentique et ayant vécu dans l'entourage de saint Paul. Condamnée au bûcher et aux bêtes sauvages, Thècle survit à ces épreuves, dont le récit est assurément légendaire. Les Actes de Paul et Thècle sont des écrits également très connus, et font partie des textes déclarés apocryphes par le pape Gélase vers 495 ; datés entre 150 et 160, ils semblent bien être considérés comme authentiques actuellement, cela signifiant que leur date la plus ancienne est admise, sans préjugé de son contenu.
Vers 200, Tertullien fait reconnaître ce texte comme inventé en grand partie et destiné uniquement à glorifier saint Paul. Au XXe siècle, les épisodes de la vie de sainte Thècle qu'il contient sont considérés comme imaginaires. Son culte a été supprimé par le Vatican en 1969, comme celui de sainte Barbe et sainte Catherine. Mais le contenu du texte a fait son succès, et la sainte est toujours fêtée, surtout à Tarragone, dont elle reste la patronne.

Statue de sainte Thècle, avec serpent et flammes à ses pieds.

Les manoirs de Ploubezre

Kerguéréon apparaît comme un bon exemple de manoir typique de la région entre 1450 et 1500 : forme en L avec une tour d'angle, fermé par une enceinte en pierre dont le rôle défensif est moins nécessaire à une époque où la guerre n'est plus endémique...
Les propriétaires peuvent recevoir les visiteurs dans des chambres d'hôte a href="http://www.guidesdecharme.com/v3/service/FICHD7CCF139-0-manoir_de_kerguereon_bretagne_maison_d_hote_lannion.html"> manoir_de_kerguereon_bretagne_maison_d_hote_lannion.html


Visite avec Min Ran en septembre 2003 -> agrandir

Kerauzern est également un manoir en L, plus grand, avec une aile gothique et une aile Renaissance.

Le château de Kergrist

Kergrist est au départ un manoir gothique, qui a été considérablement modifié pour arriver à un château essentiellement Renaissance, avec quatre tours externes et deux tours d'angle internes ; la disposition en U a créé une cour intérieure peu lumineuse. Succédant probablement au manoir de Runfao de l'autre côté d'un vallon encaissé, il a connu plusieurs familles de propriétaires.
Au XIXe siècle, il fut racheté et restauré par Charles Huon de Penanster, fondateur du Petit Echo de la Mode (dont l'imprimerie se trouvait à Châtelaudren). Le château a aujourd'hui très belle allure, et est visitable (intérieur - pour les groupes seulement - et jardins).
cf. http://kergrist.monsite.wanadoo.fr/

Le château de Coatfrec

Démantelé après les guerres de la Ligue à la fin du XVIe siècle, le château reste imposant, mais très endommagé et inhabitable. Son état actuel est bien pire que celui du château de Tonquédec, ouvert aux visites. Racheté en 2002 au marquis de Rosanbo, il a donné lieu à des opérations de dégagement et de déblaiement, que le nouveau propriétaire veut faire suivre de travaux de restauration en vue de le rendre habitable.

Le dégagement des soubassements a permis de faire apparaître l'entrée qui n'était plus connue, ainsi que deux tours plus anciennes que celle subsistant. L'histoire de Coatfrec a pu être reconstituée : à un manoir de type logis-porche à deux tours a succédé, peu après 1460, un superbe château fortifié, sur ordre du duc de Bretagne à son chambellan Guillaume de Penhoët, propriétaire du lieu. C'est donc une résidence de prestige pour un proche du duc de Bretagne qui voit le jour. Mais le côté défensif est minoré, comme en témoignent les baies superposées de la tour encore debout, ce qui a entraîné des lézardes importantes. Une comparaison entre deux photos de cent ans d'écart montre l'évolution de 1900 à aujourd'hui : le couronnement de la plus haute fenêtre est tombé lors de la tempête du 26 décembre 1999, et les pierres ont continué à s'écarter en cent ans (plus de 10 cm). Il est donc urgent de sécuriser l'existant.

A l'occasion des journées du patrimoine, le château a accueilli des visiteurs, avec plusieurs attractions : promenade en char à banc, musique médiévale, exposition d'artisanat (sculpture) et démonstration d'arbalètes et de baliste (septembre 2008).

 

(a suivre... page en cours de construction...)

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